Dans la catégorie des nombreux spin-offs de la franchise, Neptunia Riders VS Dogoos apparaît comme un changement radical. Certains jeux sont au tour par tour, d'autres plus orientés action. Ici, c'est en enfourchant une moto que Neptune, Noire, Blanc, Vert et Yuzume entrent en scène, pour le meilleur, mais surtout pour le pire. Idea Factory nous livre sans doute le plus mauvais de tous ses dérivés et je n'exagère que légèrement. Essayons d'analyser cela ensemble.
Dès les premières minutes, VS Dogoos annonce la couleur : celle d’un monde au bord de l’absurde, où les déesses ne règnent plus sur des nations, mais dérivent sur des motos au milieu d’une mer de blobs bondissants. On y retrouve Uzume, projetée sans explication dans une réalité parallèle peuplée exclusivement de Toutoumous — créatures molles et muettes, réminiscences satiriques des Gluants de Dragon Quest, vidées de toute menace mais débordantes de présence.
Ce monde-là n’a ni sens, ni structure. Et c’est peut-être volontaire. Dans un décor qui évoque un hub central sans logique spatiale, Uzume croise Neptune, transfigurée par une fascination quasi malsaine pour ces créatures visqueuses. Elle ne parle plus de sauvegarder des mondes, ni de combattre des CPU corrompues — elle veut simplement collectionner. Accumuler. Préserver ces boules roses ou bleues comme des reliques. C’est dans ce glissement étrange que le récit bascule : Neptunia Riders VS Dogoos ne cherche plus à commenter l’industrie vidéoludique, il semble plutôt moquer sa propre mythologie.
Mais là où Neptunia brillait par sa capacité à jongler entre ironie méta et affection sincère pour le médium, ce spin-off chute dans la caricature. L’histoire avance par à-coups, sans réelle tension dramatique ni montée narrative. Chaque acte se répète comme une mauvaise routine : une nouvelle zone, une rafle de Toutoumous, une confrontation expédiée. Les dialogues, autrefois savoureux de second degré et de clins d’œil bien sentis, tombent ici dans la récitation paresseuse. On cherche les étincelles d’ingéniosité, les pirouettes narratives, les bris subtils du quatrième mur — en vain.
Le constat est sévère mais inévitable : VS Dogoos semble avoir oublié ce qui faisait la sève de la série. En tentant de faire de l’humour son unique moteur, le jeu perd l’équilibre entre satire et substance. Tout s’enchaîne mécaniquement, comme un spectacle de marionnettes aux fils trop visibles, sans surprise ni véritable envol.
On pourra défendre le titre comme une récréation délirante, un interlude burlesque sans prétention. Peut-être. Mais même à ce jeu-là, Neptunia nous avait habitués à mieux. Ici, l’humour semble n’être qu’un masque posé à la hâte sur une trame désespérément creuse.
— RPG ? Action ? Quoi ?
Mais le cœur du gameplay de Neptunia Riders VS Dogoos se joue ailleurs que dans sa simple boucle de collecte. Dans un monde coloré et absurde, saturé de mascottes bondissantes et d’humour méta, ce spin-off dérive la formule de la franchise vers un genre inattendu : l’arène motorisée. Ici, les déesses ne brandissent plus leurs armes traditionnelles — elles enfourchent des motos.
Le principe semble limpide : capturer un maximum de Toutoumous, ces créatures sphériques aussi mignonnes que tapageuses. Mais derrière cette simplicité se cache une mécanique de domination territoriale où chaque glissade, chaque turbo et chaque attaque bien placée infléchit la dynamique du combat. À moto, la vitesse devient stratégie, la trajectoire un outil d’oppression. Chaque arène est un microcosme en effervescence où se joue un ballet de possession, d’agilité et de sabotage.
Les Toutoumous eux-mêmes ne sont pas de simples points de score. Chaque variété débloque des aptitudes spéciales — un saut accru, un vol temporaire, une extension de la zone de capture — et constitue, à mesure que le joueur les découvre, une boîte à outils de gameplay. Leur usage tactique reconfigure la façon dont on aborde l’arène, transformant chaque confrontation en puzzle mouvant. Mieux encore : les ennemis et les points d'intérêt ne sont jamais loin, modifiant ou enrichissant cette boucle de gameplay simpliste.
Et pourtant, malgré la richesse promise par cette formule hybride, le jeu s’embourbe dans sa propre redondance. Les arènes se succèdent, mais ne surprennent plus. Le scénario peine à justifier les enjeux, et la répétition des objectifs finit par grignoter l’enthousiasme initial. Le système de personnalisation de moto tente d’introduire de la variété, mais n’altère que marginalement la sensation de jeu. Le drift, censé être une mécanique indispensable, souffre d’une inertie mal calibrée, rendant les virages moins palpitants et pénibles.
VS Dogoos ou une idée follement originale qui aurait mérité un moteur plus robuste, une direction plus affirmée. Si l’on y retrouve l’ADN satirique de Neptunia, son gameplay, lui, vacille entre potentiel et exécution approximative.
— l'esthétique est tout de même respectée ?
Alors oui, les personnages issus de l’univers Neptunia et leurs motos profitent d’une modélisation soignée, fidèle à l’esthétique habituelle de la série. Les animations, les textures et le design global des déesses témoignent d’un certain savoir-faire, même si l’ensemble reste dans les clous d’un fan service bien rodé. En revanche, les Toutoumous — et cela reste un avis personnel — me laissent totalement de marbre. Leur design manque cruellement de caractère, ni attachant, ni intrigant, ni même volontairement grotesque. On sent l’intention de proposer une mascotte à l’image des Gluants ou des Mogs, mais sans en capter l’essence. Résultat : une créature insipide, à laquelle il est difficile de s’attacher ou même de s’intéresser.
Côté technique, que dire… sinon que le jeu frôle la parodie. Il s’agit sans doute de l’un des exemples les plus flagrants de paresse visuelle que j’aie rencontrés en tant que joueur. Le clipping est omniprésent, l’affichage progressif se déclenche sans la moindre subtilité, et cela dans des zones pourtant relativement restreintes, où une optimisation décente semblait parfaitement à portée. Par moments, on a véritablement l’impression de jouer à une version alpha.
L’accumulation de Toutoumous derrière les motos illustre parfaitement ce désordre visuel : ils tournoient mécaniquement, et certains deviennent même transparents sans raison apparente — un effet probablement non intentionnel. Je saisis ce que les développeurs ont tenté de mettre en scène, cette traînée de créatures comme prolongement du joueur, témoin de sa progression. Mais en l’état, la mise en œuvre ne fonctionne tout simplement pas.
— On achète ?
Non. Malheureusement, malgré une localisation française intégrale — ce qui, en soi, mérite d’être salué — les arguments me manquent pour vous recommander de prendre part à cette aventure. Neptunia Riders VS Dogoos donne cette impression tenace d’un projet conçu à la hâte, griffonné sur un coin de table pendant que l’équipe principale planche probablement sur le prochain volet canonique de la série.
Même les fans les plus fidèles, ceux qui collectionnent chaque spin-off avec un mélange d’indulgence et de nostalgie, ne perdront rien à faire l’impasse sur ce titre. Leur étagère ne s’en trouvera ni appauvrie, ni incomplète — bien au contraire. On pourrait être tenté d’y voir un simple divertissement, une bulle d’air entre deux aventures plus ambitieuses… mais encore faut-il que l’air en question soit respirable. Et là où d’autres jeux, parfois bien plus modestes dans leurs moyens, parviennent à proposer une expérience plaisante et cohérente à prix contenu, Neptunia Riders VS Dogoos peine à justifier son existence — encore moins son tarif.
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Neptunia Riders VS Dogoos
- Développeur : Idea Factory
- Éditeur : Idea Factory
- Genres : Action
- Consoles : PS4, PS5, Switch, PC
- Scénario 40%
- Technique 50%
- Gameplay 60%
- Plaisir 50%
- Le charadesign
- La vétusté technique
- Le manque d'engagement ressenti face à l'histoire
- Le gameplay porté par une technique bancale
- Une durée de vie infiniment petite