Test de Ever17 -The Out of Infinity- — À la recherche du bon sens !

La série des Infinity, comprend trois volets principaux Never7, Ever17 et Remember11. Ceux-ci peuvent être joués indépendamment les uns des autres, bien que les thèmes abordés soient souvent similaires. Traduit uniquement en anglais, il vous faudra une quarantaine d'heures pour en venir à bout.
Le premier jeu, sorti en 2002, avait été très apprécié par les amateurs de visual novels, notamment grâce à la présence du scénariste et réalisateur japonais Kotaro Uchikoshi. Ce dernier étant reconnu pour ses scénarios complexes qui mêlent surnaturel et psychologie. Pour ma part, je suis une grande fan de la série Zero Escape, pour ne citer qu'une de ses licences, et il est vrai qu'on y retrouve les codes de son génie.
Je ne vous en parle pas par hasard, car il faudra bien s'accrocher pour saisir toutes les perspectives qu'apporte Ever17 -The Out of Infinity- !

C'est avec beaucoup d'émotion que j'ai eu l'opportunité de reprendre ma plume pour tester le remaster du roman visuel Ever17 -The Out of Infinity-, développé par Mages. Ce test a été réalisé grâce au généreux concours de l'éditeur.

Plein de loopings à LeMU !

Aimez-vous les parcs à thème marins ? Nos héros aussi, et c’est d’ailleurs dans ce cadre enjoué que débutera leur aventure qui se voulait initialement festive. Lors d'une visite au parc d’attractions LeMU, notre protagoniste, Takeshi, pensant passer une journée agréable, se retrouvera au cœur d'un incident. Lui et les cinq autres personnages principaux se retrouveront piégés dans cette prison aquatique. Pour pimenter un peu leur situation, les moyens de communication seront coupés et la plupart des lieux inondés. Pour s'en sortir vivants, ils devront trouver une solution avant que le compte à rebours ne tombe à zéro. La pression de l'eau, qui s'intensifie au fil de l'aventure, compliquera encore davantage leur tâche.

Le LeMU cache bien plus de secrets dans ses profondeurs qu'il n'en laisse paraître. Son exploration sera très révélatrice, amenant nos héros à douter que leur présence là-bas soit le simple fruit du hasard. Chacun ayant sa propre trame à suivre, et croyez-moi, elles ne sont pas linéaires, elles font par ailleurs énormément de vagues !

Une particularité du jeu réside dans le fait qu'une fois l'incident déclenché, deux branches narratives se dévoilent déjà : la voie Takeshi et celle du Garçon amnésique. Au total, le jeu propose neuf routes. Elles comprennent trois mauvaises fins facilement évitables, quatre bonnes fins nécessaires pour débloquer la véritable fin. Il existe une fin bonus, qui ne pourra être obtenue automatiquement qu'après avoir découvert toutes les autres. Nous avons cinq personnages principaux pour nous accompagner tout au long du jeu : Tsugumi, l'héroïne mystérieuse et très forte. Sora, l'ordinateur plein de ressources de LeMU. You, une fille pleine d'énergie. Selon la voie suivie, nous découvrirons Sara, une amie de You qui se proclame ninja. Ou bien Coco, une petite fille friande de blagues de mauvais goût.

Tous les personnages ne sont pas à courtiser. Ever17 -The Out of Infinity- ne cherche pas à être un énième eroge ou un jeu de simulation de drague. C'est plutôt une véritable histoire qui se dévoile au fur et à mesure des routes empruntées. Le jeu se présente en boucle et ne s'en cache pas.

Contrairement à d’autres romans visuels, il est vraiment nécessaire de compléter toutes les bonnes routes pour en tirer pleinement satisfaction. Une seule route ne vous permettra pas de comprendre l’ensemble du jeu, ni d'en être rassasié. Très sincèrement, j’ai eu beaucoup de mal à avancer au début, mais j’y reviendrai plus tard dans ce test.

Ever17 -The Out of Infinity- Au-delà des apparences !

Autant, côté scénario, c’est hors limite, avec une structure non-linéaire et des événements qui réorientent constamment l’histoire, autant il se bride en termes de sons et d’images.
Ce roman visuel n’offre pas une bande-son exceptionnelle, les mélodies sont même plutôt mal gérées. Cependant, le doublage est réussi : chaque voix colle bien à son personnage, et on peut facilement les identifier. On aurait pu se passer de la mélodie redondante, qui ne varie pas, même pour les scènes tristes. Les alertes sonores, elles, explosent dans les oreilles. Si vous cherchez de l’immersion, il serait préférable qu'elle soit moins agressive. Certaines scènes sont insupportables à écouter, et on passe les dialogues plus vite juste pour s'en échapper.

Graphiquement, on a vu mieux. Les décors ne varient pas beaucoup. On peut mettre ce manque sur le compte du projet confinement vendu par le synopsis. Quant aux sprites, il est difficile de trouver une excuse valable, car ils sont peu nombreux et ne se distinguent pas par rapport à d’autres jeux de la même époque. On reste sur du très basique. Le jeu tente également d’intégrer des éléments 3D dans quelques cinématiques, mais c'est un échec. C'est juste moche. Cela n’apporte rien de plus et donne plutôt l’impression d’être un test pour observer la réaction des joueurs face à cette nouvelle "technologie", sans doute innovante pour l’époque. Je me répète, mais c'est vraiment moche.

Étonnamment, l'éclairage des portraits des personnages dépendent de l’endroit où ils se trouvent. Le rendu donne des apparences sombres une grande partie du temps. Les CG, en revanche, apportent une douceur à leurs traits. Elles permettent de compenser les portraits qui sont moins travaillés. On est content de les débloquer, même s'il y a un peu de fan-service propre à l'univers japonais. Oui, ce n'était sans doute pas le moment de déguiser notre héroïne en soubrette, mais après tout, si on doit exploser dans 170 heures, pourquoi pas ?

Scénaristiquement, le jeu n’a pas un rythme soutenu. On nous plonge dans une ambiance qui se veut nerveuse —leurs vies sont en danger—! En parallèle, on nous sert des éléments de tranche de vie inadaptés. Ces passages traînent en longueur sans vraiment apporter de plus-value : on fait à manger, on joue à des jeux d’enfants. On ne ressent pas la pression de cette situation, le compte à rebours est le seul rappel de l'implosion imminente. Il y a des moments plus adaptés pour jouer à cache-cache ou imiter des poussins, non ? Le seul bénéfice serait que, grâce à ces moments "hors du temps", on puisse se rendre compte des dynamiques entre les personnages, et s'attacher un peu plus à eux. Chacune de leur trame personnelle est exploitée, certaines plus que d'autres, pour un final où toutes leurs histoires se rejoignent.

Le jeu permet tout de même de passer les dialogues déjà lus. Cependant on doit tout de même relire de grosses parties qui se répètent dans toutes les routes. Les choix sont limités, et il n’y a pas de difficulté à passer d’une route à l’autre, comme dans la plupart des œuvres. Il suffit de rester fidèle à la route que l'on souhaite suivre, et on n’en sortira pas. Ever17 -The Out of Infinity- joue avec le fait que l’on doive recommencer encore et encore. Le jeu nous demande explicitement de boucler la boucle de l'infinie, car il recherche, tout comme nous, une fin véritablement heureuse pour tous ses protagonistes.

Ever17 -The Out of Infinity- À la recherche du bonheur : une question de perspective ?

Nous passons de personnage à lecteur pur, de route en route, navigant entre différents points de vue, voire différents espaces-temps. Ever17 -The Out of Infinity- joue sur l’espace et le temps de la même manière qu'un Steins;Gate, nous faisant recommencer consciemment notre partie, jusqu'à ce que tous les secrets soient dévoilés.

Lors de ma première partie, j'ai été déçue par la fin qui m’a été révélée. J'ai pensé à tous ceux qui s'arrêtaient à une seule route, et cela m'a d'autant plus frustrée. Après tout, si la première expérience est décevante, qu’est-ce qui pourrait pousser un joueur à recommencer pour découvrir les autres routes ? "Bonne fin", voilà ce qui s'affiche après une première route légèrement bâclée, avec des éléments importants jetés en dernière ligne droite, si on a eu suffisamment de courage pour tenir jusque-là. Pas de cinématique particulière, pas de récompense propre. C'est dommage, le jeu compte sur l'envie et la patience du lecteur pour qu'il s'obstine à relancer une partie.

Pour quel résultat me demanderez-vous ? Pour un épilogue grandiose où tout prend enfin sens.

Le scénario final atteint est à couper le souffle. On peut toujours formuler quelques hypothèses au fur et à mesure de l'aventure, mais il est évident qu’on est encore loin de la vérité. C’est complexe, très complexe (maritime !), et même en ayant tous les éléments en main, on n’est pas sûr de tout comprendre tant tout est remis en question à chaque nouvelle intrigue.

Dans la véritable fin, il y a un résumé pour chaque route, afin de s'assurer que tout nous est bien expliqué avant que l'on éteigne définitivement la console —qui a bien chauffé au cours de nos nombreuses heures de lecture—. J'ai personnellement trouvé que la voie du Garçon amnésique était beaucoup plus intéressante à suivre que celle de Takeshi, qui est plus commune et plus superficielle. C'est pourtant bien avec lui qu'il vous faut commencer, vous obligeant à persévérer pour découvrir cette œuvre dans son intégralité.

La voie du Garçon amnésique soulève plusieurs interrogations. En effet, elle donne envie d'en savoir plus, surtout que ses routes ne se concluent pas par un simple "ils tombèrent amoureux". De vrais liens sont créés. Il y a davantage d'enjeux, plus de clarifications, et donc plus de plaisir pour nos pupilles.

J'ai beaucoup apprécié la voie supplémentaire qui permet de voir, d'un point de vue externe, toutes ces routes, comme la lectrice que je suis. Il est difficile de vous expliquer à quel point les retournements de situation sont ingénieux sans vous dévoiler l'histoire, mais faites-moi confiance et plongez dans ce bassin énigmatique qu'Ever17 -The Out of Infinity- vous réserve. Le jeu est un véritable classique du genre. D'ailleurs, je m'apprête à découvrir prochainement les autres volets de la licence avec plaisir. En espérant que mon confrère Biobi ait pu en tirer autant de satisfaction que moi, étant donné qu'il est chargé du test de Never7 -The End of Infinity- !

Ever17 -The Out of Infinity- sortira le 6 mars 2025 sur Nintendo Switch.